Un synode sur les pattes arrière face au projet de tailler dans les paroisses pour cantonaliser l’innovation
Photo: Les votes ont eu lieu à bulletin secret
Par Joël Burri
Une fois par législature de cinq ans, le Conseil synodal (exécutif) de l’Église évangélique réformée du canton de Vaud (EERV) doit soumettre au Synode (organe délibérant) un plan de dotation. C’est-à-dire la répartition des ressources humaines entre les différents types de ministères. C’est à cet exercice que le Synode réuni à Prilly vendredi soir et samedi s’est livré. Mais après un débat d’entrée en matière de près de 6 heures, les délégués des régions et services cantonaux ont renvoyé, par 47 voix contre 27 et 2 abstentions, sa copie à l’exécutif.
Sur fond de diminution de la voilure d’environ 220 à 204 équivalents plein-temps, en raison de l’accord de rééquilibrage de la subvention cantonale au profit de la Fédération ecclésiastique catholique romaine du canton de Vaud (FEDEC-VD), le Conseil synodal proposait aux régions et paroisses un effort supplémentaire pour cantonaliser certaines tâches (notre édition du 12 janvier 2018). Il s’agissait d’une part de centraliser les responsables régionaux des œuvres et de la communication pour permettre d’en faire de véritables postes plutôt que des taux d’occupation réduits répartis dans les cahiers des charges de nombreuses personnes. D’autre part, de créer des postes permettant de favoriser l’émergence de nouvelles formes ecclésiales dans le but «d’augmenter la surface de contact de l’Église avec la société», selon la formule du Conseil synodal.
Renforcer les paroisses plutôt que le centre
Malgré les différentes variantes proposées par l’exécutif, la commission d’examen de ce dossier a regretté qu’aucune alternative à la centralisation ne soit proposée. Tous les scénarios partent du principe que «les pasteurs absorbés par les affaires courantes incompressibles comme les cultes et les enterrements n’ont plus la possibilité de chercher à renouveler l’Église», a résumé le rapporteur Boris Voirol. La commission a donc proposé sa variante, dans laquelle le siège de l’Église perdait des postes au profit des paroisses et régions. «On présente comme une évidence que les paroisses périclitent, mais ce n’est pas vrai!», a renchéri le délégué laïque Olivier Delacrétaz. Plusieurs délégués ont par ailleurs accusé «le centre» de ne plus être «en contact avec les réalités des paroisses», comme l’a par exemple dit le pasteur Laurent Lasserre qui a cité les papillons en couleur et les oriflammes créés à l’occasion du jubilé des 500 ans de la Réforme en 2017 et envoyés à toutes les paroisses, alors que celles-ci multiplient les mesures d’économie.
Évaluer la politique menée ces dernières années
Soulevant que le projet du Conseil synodal s’inscrivait dans la continuité du projet de réforme de l’Église du début des années 2000 «Église à venir», la déléguée laïque Suzette Sandoz s’est demandé si ce programme «a permis une bonne adaptation de l’Église aux changements de la société.» Elle se ralliait donc à l’idée de refuser l’entrée en matière en attendant un rapport plus complet de la part du Conseil synodal. Une demande qui a, semble-t-il, déjà fait l’objet d’un courrier adressé par quelques délégués à l’ensemble du Synode avant la rencontre.
Une proposition largement combattue par Xavier Paillard, président du Conseil synodal. «Les négociations avec l’État concernant la convention de subventionnement pour les années 2020-2024 vont débuter cette année. Nous avons besoin du plan de dotation maintenant.» Selon le pasteur, la subvention est découpée en plusieurs domaines d’attribution; il ne lui suffit donc pas de connaître la cible de 204 postes pour entamer la discussion. Malgré cet argument, les délégués ne se sont pas sentis obligés d’entrer en matière et le Conseil synodal présentera un nouveau rapport sur les dotations cette année ou l’année prochaine.
Ce débat est le signe «d’un grave manque de confiance envers le Conseil synodal et d’un grave manque de communication», a analysé Martine Melden, déléguée de l’État lors d’une intervention. Selon la députée au Grand Conseil, «c’est pour cela que le Synode est sur les pattes arrières face à ce projet!»