L’agroécologie, un chemin vers l’émancipation de la femme

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L’agroécologie, un chemin vers l’émancipation de la femme

Laurence Villoz
7 mars 2018
Alors que 80% de la population au Mali travaille dans l’agriculture, des initiatives locales prônent l’agroécologie, la culture durable et la production de semences
Invitée dans le cadre de la campagne œcuménique, Alimata Traoré, présidente de la Convergence des femmes rurales pour la souveraineté alimentaire raconte leurs combats. Interview.

Photo: Alimata Traoré

Réunissant plus de 4000 agricultrices maliennes, la Convergence des femmes rurales pour la souveraineté alimentaire (COFERSA) s’inscrit dans un processus de transition en valorisant la culture de produits régionaux sans pesticides et la production des semences locales. Maïs, millet, sorgo, tubercules, haricots, ces femmes cultivent toutes sortes de denrées pour nourrir les communautés. Rencontre avec Alimata Traoré, présidente de l’association.

Quels sont les objectifs de la Convergence des femmes rurales pour la souveraineté alimentaire (COFERSA)?

Nos principaux objectifs sont la promotion de la femme rurale et l’amélioration de son statut social afin de lui permettre de s’émanciper. Actuellement, les femmes sont nettement plus impliquées et productives dans le travail de la terre, au Mali. Nous souhaitons valoriser leurs connaissances en agroécologie, créer des leaderships féminins pour être autonomes et augmenter leur pouvoir économique.

Depuis sa création en 2009, quelles ont été les plus grandes victoires de la COFERSA?

Avoir accès à la terre est un réel défi pour les femmes maliennes. Les terres appartiennent aux hommes. Elles sont transmises de père en fils et même lors de ventes les femmes n’y ont pas droit. Grâce à notre travail, nous avons pu obtenir plus de 50 hectares auprès des chefs des villages. C’est extrêmement rare.

Comment avez-vous réussi cet exploit?

Nous avons monté des plaidoyers autour de l’agroécologie et la protection de l’environnement. Nous avons mis en place des formations sur les enjeux globaux de l’agriculture: le respect de la terre, l’accès à l’eau, la question des semences. Ces formations étaient destinées aux femmes, mais quelques hommes influents y ont participé. Ils ont pris conscience de nos connaissances. C’est ainsi qu’on a gagné leur confiance et ils nous ont donné des terres. Actuellement, nous sommes autonomes. Nous avons collecté de vielles semences dans les communautés et nous les multiplions. Nous produisons tous du champ à l’assiette.

Actuellement, quels freins rencontrez-vous?

La principale difficulté consiste à trouver du soutien financier pour construire des circuits d’alimentation en eau ainsi que pour sécuriser les cultures contre les animaux qui viennent piller les récoltes. Nous en recherchons auprès d’organisations internationales, car l’État ne nous aide pas. Il n’a pas compris l’importance de l’agroécologie, d’organiser localement et communautairement de nouvelles manières de cultiver. J’ai créé des plaidoyers pour intégrer cela dans le programme de développement du Mali, mais je n’ai pas reçu le soutien espéré.

Comment voyez-vous le futur?

Même si le gouvernement ne nous soutient pas, je pense que ce que nous faisons avec la COFERSA est un succès, car je constate que ce mode de culture s’étend. En 2009, on était 13 coopératives et maintenant près de 40. Tous nos membres viennent suivre des formations autour de l’écologie et de la culture sans produits chimiques et ramènent ensuite ce qu’ils ont appris dans leur village. C’est ainsi que nous gagnons du terrain.

Rencontres et conférences

Présente en Suisse du 3 au 19 mars dans le cadre de la campagne œcuménique, Alimata Traoré donnera plusieurs conférences sur les coopératives de femmes maliennes engagées pour la promotion et la diffusion de l’agroécologie et participera à des débats autour de la projection du film «Cultures en transition».

- Mercredi 7: Conférence à l’Uni Mail (salle MS160), à Genève de 12h15 à 13h30.
- Jeudi 8: Conférence à Alliance Sud, à Lausanne, de 12h15 à 13h15.
- Lundi 12: Soirée projection-débat à la salle paroissiale d'Alle (JU), de 19h30 à 22h.
- Jeudi 15: Soirée projection-débat au Centre spirituel Sainte-Ursule à Fribourg, de 19h à 21h30.
- Vendredi 16: Soirée projection-débat à l’Espace Création à Sion, de 19h30 à 22h.