Les Églises sont en droit de se montrer critiques envers d’autres confessions
Photo: La cathédrale Saint-Martin de Mayence CC (by-nc-nd) kristobalite
Mayence (EPD/Protestinter) – Contrairement aux institutions publiques, les Églises n’ont pas d’obligation de neutralité vis-à-vis des autres communautés religieuses. Rien ne force leurs représentants à se limiter à des déclarations de nature purement conventionnelle lorsqu’ils s’expriment sur des groupes religieux, affirme un jugement rendu fin février par le tribunal administratif de Mayence. Celui-ci a débouté une Église libre coréenne de sa plainte à l’encontre de l’évêché catholique de la ville.
L’association International Youth Fellowship (IYF), une organisation de jeunesse du mouvement «Good News Mission» fondé par le pasteur sud-coréen Ock Soo Park, avait loué en 2016 la salle de spectacle mayençaise Rheingoldhalle. Elle comptait y organiser une grande manifestation de plusieurs jours, comprenant différents concerts. À l’approche de cet événement, Eckhard Türk, le responsable en charge des sectes et des visions du monde au sein de l’évêché catholique, s’était exprimé sur le sujet dans de nombreux médias où il était invité en tant qu’expert. La communauté coréenne avait répondu à ses critiques par une procédure judiciaire.
L’IYF souhaitait faire interdire à l’évêché d’exprimer toute remarque pouvant laisser penser que l’association représentait un danger, qu’elle visait à tirer parti de sa manifestation dans un but d’endoctrinement du public, et n’avait prévu des concerts qu’en guise d’«appâts» pour formater les consciences. Les interviews du représentant catholique auraient placé le mouvement coréen sur le même plan que des sectes considérées comme dangereuses.
Exprimer ses craintesLes juges de Mayence ont eux aussi souligné que les représentants officiels de l’Église ne pouvaient «se livrer sans réfléchir à de fausses déclarations». Pour autant, ils conservent le droit «d’attirer l’attention, dans le cadre d’une explication publique de leurs positions religieuses, sur des conceptions que leur doctrine considère comme incompatibles avec la foi». Le représentant de l’évêché avait notamment fait référence à des opposants également coréens de l’association, sans pour autant faire siennes leurs paroles. Dans le cadre d’un débat, l’usage de termes tels que «manipulation» ou «appât» n’est en rien proscrit.
«Ces déclarations, sous la forme où elles étaient exprimées, étaient légalement acceptables», a affirmé Christof Berthold, le vice-président du tribunal, lors de la proclamation du verdict. La charge des frais judiciaires incombera à l’Église libre coréenne. Contrairement aux habituelles actions en cessation préventive, cette affaire n’a pas été jugée par un tribunal civil: en effet, le responsable concerné s’était exprimé en sa qualité de représentant de l’évêché et l’Église catholique, en tant que corporation de droit public, dispose d’un statut particulier.