A Noël, les Allemandes sans enfant sont exposées aux jugements
Photo: CC (by-nc-nd) Fabrice Pajot
(EPD/Protestinter)
Munich – Pour la sociologue munichoise Paula-Irene Villa, ne pas avoir d’enfant n’est toujours pas reconnu par les Allemands comme un choix de vie acceptable. «Les femmes qui choisissent de ne pas être mères font l’objet de jugements», a-t-elle déclaré au Service de presse protestant (EPD). Lors des fêtes familiales telles que Noël, elles se voient souvent obligées de se justifier.
«La féminité qui ne s’épanouit pas à travers la maternité est soit considérée avec pitié, soit visée par les critiques», poursuit cette professeure et chercheuse, spécialisée en études de genre. L’idée que les femmes ne peuvent se réaliser que dans le rôle de mère nous vient du xixe siècle, et reste bien présente aujourd’hui. Ainsi, elles sont définies en premier lieu en fonction des critères physiques associés à la fertilité. «Il en découle la conception que tout projet de vie n’impliquant pas la naissance d’un enfant est contre nature.»
Encore de nos jours, les femmes qui ne souhaitent pas avoir d’enfant s’entendent régulièrement dire qu’elles finiront par le regretter. «On leur fait sentir qu’elles ne savent pas ce qu’elles veulent vraiment.» Elles peuvent aussi être vues comme trop «tournées vers leur carrière» - bien qu’être femme politique ou entrepreneuse suscite le respect de tous. «Chez une femme sans enfant, la passion de son travail est vite considérée comme pathologique», explique Paula-Irene Villa. Le même comportement, exprimé par une mère, est jugé d’un œil tout à fait différent.
Des critiques peu subies par les hommes«Les femmes doivent se montrer pleines de sollicitude et désireuses de se consacrer aux autres.» Ne pas avoir d’enfant, c’est aller à l’encontre de cette image. Entre 30 et 45 ans, les Allemandes concernées sont donc régulièrement interpellées sur le sujet - «y compris en public et de manière très irrespectueuse». Dans la même situation, les hommes ne sont pas aussi exposés à ces comportements, car bien que l’idée de paternité fasse partie de l’idéal de la virilité, elle est plutôt associée au rôle du soutien qui fait vivre la famille. «Nos représentations sociétales commencent à peine à se détacher [de ces lieux communs] - bien que de nombreuses personnes vivent depuis longtemps de manière tout à fait différente.»
Les familles aussi deviennent plus diverses, se recomposent, rassemblent plusieurs générations sous le même toit ou s’ouvrent à des amis. Au cinéma non plus, la famille n’est plus représentée d’après le modèle figé du trio père-mère-enfant. «A très long terme, cela modifiera également la manière dont on considère l’absence d’enfant biologique», suppose Paula-Irene Villa.