Mandela: un long chemin vers la liberté

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Mandela: un long chemin vers la liberté

19 décembre 2013
Le film adapté de l’autobiographie de Mandela est sorti cette semaine dans les salles romandes. Un récit qui couvre plusieurs décennies et que «Tata Madiba» comme le surnomment affectueusement ses compatriotes, avait commencé à rédiger clandestinement lors de ses années de captivité.

par Anne-Sylvie Mariéthoz

Différents épisodes de la vie du leader ont déjà inspiré les cinéastes, mais aucun n’avait osé aborder jusqu’ici son parcours dans sa globalité, de son enfance à son accession au pouvoir.

La nouvelle est tombée en pleine avant-première du film à Londres il y a quinze jours: Nelson Mandela, le père de la nation sud-africaine, venait de tirer sa révérence. Il avait quitté la vie publique depuis plusieurs années, mais n’en restait pas moins un modèle de sagesse et de tolérance respecté dans le monde entier. Rendre justice à une personnalité d’une telle envergure n’est pas une mince ambition et deux heures trente y suffisent à peine.

Un homme et non un saint

Avec ce biopic aux ambitions encyclopédiques et formaté pour le grand public, le réalisateur Justin Chadwick ne réinvente certainement pas le genre. Mais il faut néanmoins lui reconnaître, ainsi qu’à son scénariste William Nicholson, le mérite d’avoir su montrer différentes facettes du personnage, sans sombrer dans l’hagiographie béate. L’intéressé s’était d’ailleurs défendu à maintes reprises contre cette forme de «canonisation» imposée de son vivant. «Je n’étais pas un messie mais un homme ordinaire devenu un leader en raison de circonstances extraordinaires», aimait-il à répéter.

Boy, negro, native…

«Boy, negro, native...» Tels sont les mots qui cueillent froidement le spectateur comme le héros, sitôt projeté dans l’atmosphère tendue du Johannesburg des années 40. Après une brève incursion dans l’enfance - sorte de parenthèse dorée, dans un décor sublime où les colons blancs ne semblent encore avoir jamais mis les pieds – ces mots résonnent avec une brutalité particulière. A ce mépris auquel s’ajoutent d’autres formes de violence, le Congrès national africain (ANC) oppose tout d’abord une résistance passive. Mandela y adhère dès 1944. Brillant avocat et militant engagé, le Mandela de cette époque ne manque pas de charisme ni de détermination. Mais il peine à trouver son chemin entre cette cause qui l’absorbe, sa famille qu’il néglige et ses nombreuses admiratrices. A force de désillusions, la lutte armée lui semble bientôt la seule voie possible.

One man, one vote

La suite comme on le sait, se déroule pour bonne part en prison. Il est logique que ces scènes tiennent une place conséquente, étant donné que Mandela a passé derrière les barreaux le tiers de son existence. Mais si cette partie s’efforce d’illustrer la dureté des conditions de détention, elle ne permet malheureusement aucunement d’expliquer le changement qui s’opère chez le personnage.

Quand le héros de la nation est libéré, c’est un personnage qui a acquis une stature et une aura exceptionnelles (que l’acteur britannique Idris Elba parvient du reste à camper de manière convaincante).

On voit la mobilisation se poursuivre, le pays évoluer sous la pression internationale, Winnie, son épouse, se radicaliser avec une partie de l’ANC, mais aucun élément ne nous est donné en revanche, pour expliquer comment Mandela passe de la lutte armée au pacifisme.

Le film nous mène jusqu’en 1994, moment où l’ex-prisonnier est élu à la présidence. Il boucle ainsi un chapitre de l’histoire sud-africaine, celui de la revendication du suffrage universel, rappelée à plusieurs moments clé du film. Sur le plan pédagogique, on dira donc que cette oeuvre remplit partiellement sa mission. Elle parvient aussi à susciter chez le spectateur un véritable enthousiasme pour cette figure d’exception. Ce qui n’est peut-être déjà pas si mal après tout.

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