Un théologien pointe les corrélations entre christianisme et religion traditionnelle africaine

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Un théologien pointe les corrélations entre christianisme et religion traditionnelle africaine

8 mai 2012
Nairobi, le 8 mai (ENInews\Fredrick Nzwili) – Les missionnaires sont parvenus à diffuser le christianisme en Afrique à une époque où les religions tribales étaient ignorées ou méprisées. Cependant, selon une nouvelle édition du livre Concepts of God in Africa (Les conceptions de Dieu en Afrique), le christianisme a bénéficié de certains aspects de la religion traditionnelle. Cinq cent cinquante peuples et langages africains y sont recensés.

En plein XIXe siècle, un missionnaire demande à des Africains de Zanzibar de lui dire quelque chose sur leur Dieu. Ils répondent tout simplement: « Dieu fulmine! » L'homme avait traversé les mers pour parler de Dieu aux « païens sans religion » ou aux « peuples pratiquant une religion primitive ».

Cette scène, John Samuel Mbiti, universitaire et théologien, la raconte dans son ouvrage qui vient d'être réédité. Il y explique en détail comment les Africains imaginent Dieu et le lien qu'ils ont avec lui dans tous les aspects de leur vie. « La culture africaine est construite sur la tradition orale (et symbolique) et se transmet ainsi. Mon livre est une minuscule portion de cette tradition », a déclaré M. Mbiti au correspondant d'ENInews, ajoutant que l’ouvrage lève le voile sur la richesse de la conception de Dieu en Afrique.

Il établit que la religion africaine partage avec les traditions chrétienne et juive de nombreuses caractéristiques communes qui ont contribué à l'expansion rapide du christianisme. Ainsi, M. Mbiti affirme que les traductions de la Bible se servent de mots africains pour désigner Dieu.

« Olodumare », le Tout-Puissant

Les bibles sont arrivées en Afrique en anglais ou en français et ont été traduites dans les dialectes locaux par des érudits et des théologiens autochtones. Le livre donne l’exemple de la tribu Yoruba, au Nigeria, où le mot pour Dieu est « Olodumare », c'est-à-dire le Tout-Puissant.

« Inévitablement, cela favorise l'interaction entre les deux traditions religieuses. La religion africaine dit oui à la tradition biblique et l'accommode de bon cœur, et de son côté, la tradition biblique dit oui aux éléments similaires dans la religion africaine », explique M. Mbiti dans la préface de son livre.

Le livre est publié par Acton Publishers à Nairobi. La première édition avait été publiée à Londres en 1970 par l'Association de promotion de la connaissance chrétienne (SPCK), mais elle était épuisée. Publiant des ouvrages depuis 1698, la SPCK, à Londres, est la plus vieille organisation missionnaire anglicane.

Cette seconde édition s'intéresse à 550 peuples et langages africains, soit 250 de plus que la première édition. Elle recense 1600 noms pour Dieu, y compris dans le plus jeune pays du monde, le Soudan du Sud, où le terme animiste est souvent employé pour désigner la religion d’une grande partie de la population. Il y existe néanmoins un nom traditionnellement utilisé pour désigner Dieu. La nouvelle édition contient par ailleurs des informations nouvelles, un plus grand nombre de mots désignant Dieu dans les langues africaines, ainsi qu'une bibliographie mise à jour, un index révisé et des annexes plus fournies.

Contribution à la Renaissance africaine

Selon Jesse Mugambi, professeur de philosophie et d'études religieuses à l'Université de Nairobi, le livre confirme une nouvelle fois que le patrimoine culturel et religieux africain est fondé sur Dieu, un concept qui était jugé inexistant dans les religions traditionnelles.

« Cet ouvrage invite à réévaluer le patrimoine culturel et religieux de l'Afrique et à lui accorder l'attention qu'il mérite », a indiqué Jesse Mugambi, qui signe l'avant-propos du livre.
 « Le christianisme progresse rapidement en Afrique et en Asie. Dans un contexte de méconnaissance des différentes visions du monde de la part du christianisme occidental, je pense que ce livre arrive à point nommé. Il constitue une contribution importante à la Renaissance africaine », a-t-il affirmé.



Considérer que les interactions entre christianisme et religions traditionnelles africaines sont positives et non pas nuisibles est un processus complexe, mais John Samuel Mbiti affirme dans son livre que ce processus est en cours. Il écrit: les deux traditions religieuses ont établi une relation profonde autour de leur élément fondamental – Dieu. (673 mots-ENI-12-F-0067-JMP)