L’agence de presse religieuse Ecumenical News International dans la tourmente
Les deux principaux organismes de soutien et de financement d’ENI en langue anglaise ont annoncé au début du mois de décembre 2011 une réduction massive de leurs contributions pour 2012: le COE a réduit sa participation de 150 000 à 50 000 francs suisses. La Fédération luthérienne mondiale (FLM) a suivi le mouvement en faisant passer la sienne de 80 000 à 25 000 francs. La Conférence des Eglises européennes KEK, qui versait jusqu’ici 25 000 francs par an, n’est plus en mesure de fournir une contribution financière. Seule la Communion mondiale d’Eglises réformées (CMER) a maintenu sa contribution annuelle à 30 000 francs.
Fin d'un réseau international ?Ainsi, il ne reste que moins de 110 000 francs pour l’année 2012, sur un budget de 320 000 francs. Si la situation ne change pas, ENInews devrait cesser ses activités à fin avril 2012. Une voix importante pour la vie ecclésiastique internationale et la collaboration entre communautés religieuses se tairait ainsi, et le réseau de correspondants se désagrégerait très vite.
Il s’agit donc de trouver de nouveaux partenaires et bailleurs de fonds d’ici fin avril 2012. Les négociations en cours permettent d’espérer, mais les nouveaux partenariats et promesses ne pourraient prendre effet qu’en 2013, ce qui signifie que des contributions uniques extraordinaires seront nécessaires pour boucler le budget 2012.
Ce coup de semonce intervient peu après des premières réductions du budget d'ENInews, qui est passé de 700 000 francs en 2008 à 320 000 francs en 2011. Le budget de l'agence se montait encore à 580 000 francs en 2010.
Coup de pouceUne Eglise alémanique a fait un geste. Le Conseil de l’Eglise d’Argovie a décidé de verser une contribution unique de 20 000 francs à ENInews. Un représentant de l’Eglise réformée du canton d’Argovie est l’un des deux délégués de la CMER à l’Assemblée générale d’ENI.
Une journaliste employée à 80%, et basée à New York, a pris le relais fin 2010 des deux journalistes, basés de longue date à Genève. Solange de Santis a repris et amélioré un réseau d’une cinquantaine de correspondants sur tous les continents, dont environ 30 envoient régulièrement des articles.
En 2011, 700 articles au total ont été produits. Les informations sont publiées en anglais, une traduction française est réalisée par les Eglises réformées de Suisse romande, via l'agence de presse ProtestInfo. Des négociations sont en cours pour la traduction en allemand de textes choisis.
Près de 300 abonnés en anglaisLes articles sont mis à la disposition des quelque 300 abonnés de l’agence – médias, organisations d’Eglises et abonnés individuels dans le monde entier. Des médias religieux en Europe et en Amérique du Nord, mais aussi des médias non religieux qui publient des articles sur les Eglises et les événements religieux (par exemple BBC World) utilisent les textes d’ENI.
En français, ENInews compte une soixantaine d'abonnés, avec des journaux comme La Croix, Réforme et le centre de documentation pour trois autres journaux français, dont le Monde des religions.
ENInews produit et distribue des articles et des reportages sur des sujets en rapport avec les Eglises et les religions du monde entier, sur mandat de quatre organisations œcuméniques internationales: le Conseil œcuménique des Eglises (COE), la Communion mondiale d’Eglises réformées (CMER), la Fédération luthérienne mondiale (FLM) et la Conférence des Eglises européennes (KEK).
ENInews relaie la voix des Eglises du Sud et de l'Estdans les médias du Nord
Selon Michel Kocher, ancien président d'ENI, « ENInews a un standard de qualité élevé, qui assure sa crédibilité dans les médias laïques et fait son originalité dans les médias d'églises. Remplacer le travail d'une agence de presse par une communication institutionnelle uniquement est une piste dangereuse pour les Eglises », estime-t-il.
De plus, poursuit le journaliste et théologien, « ENInews relaie la voix des Eglises du Sud et de l'Est (orthodoxie) dans les médias du Nord. Personne d'autres ne le fait. Si ce réseau qui a mis du temps à se constituer devait disparaître, le reconstruire serait infiniment plus coûteux. »
Grave crise financière au Conseil œcuménique des EglisesLa débâcle de l'agence de presse ENInews a pour toile de fond les difficultés économiques que traverse le COE. Selon une information publiée par l’agence de presse protestante allemande epd (Evangelischer Pressedienst), et reprise par reformierte presse, un déficit de plusieurs millions enregistré dans sa Fondation de retraite plonge le COE dans la plus grave crise financière de son histoire. Il est question de vendre des biens immobiliers du COE à Genève.
« La Fondation de retraite se trouve dans une situation très difficile », a déclaré le secrétaire général du COE Olav Fykse Tveit à l’agence epd. Le pasteur luthérien originaire de Norvège a informé les Eglises membres de la gravité de la situation il y a quelques semaines, indique l’agence epd. Un comité d’orientation composé de sept experts a été mis en place pour soutenir le Conseil œcuménique des Eglises, basé à Genève, dans la recherche d’une solution à la crise financière.
« Nous devons résoudre cette crise et nous le ferons, sans quoi la crise de la Fondation pourrait se transformer en une crise institutionnelle du Conseil œcuménique des Eglises tout entier », a ajouté le pasteur Tveit.
La Fondation de retraite, qui fonctionne selon un système mixte de capitalisation et de répartition, enregistre une lacune de couverture de quelque 30 millions de francs suisses. Le déficit s’explique par l’augmentation considérable du nombre des bénéficiaires de rente, associée à la diminution simultanée de celui des cotisants.
L’Autorité fédérale de surveillance, compétente en la matière, insiste pour qu’une stratégie de stabilité à long terme soit mise en place afin de remédier aux difficultés financières de la Fondation. Dans cette perspective, le COE négocie actuellement l’affiliation à une Fondation de prévoyance plus importante, qui pourrait assurer une meilleure couverture des risques.
Selon l’évêque allemand Martin Hein, membre du Comité central du Conseil œcuménique des Eglises, on envisage aussi de « monnayer » le site genevois du Conseil œcuménique, où travaillent quelque 150 collaboratrices et collaborateurs.