« Hokhma », cent numéros franco-suisses de réflexion théologique

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« Hokhma », cent numéros franco-suisses de réflexion théologique

19 décembre 2011
Le numéro 100
de Hokhma (sagesse en hébreu) vient de sortir. Ses 500 abonnés peuvent y savourer quelques textes qui ont marqué l'histoire de la revue. Dans la barque depuis sa création en 1975, le pasteur réformé et veveysan Gérard Pella en dresse le portrait et esquisse les enjeux. (Ci-contre: la couverture du numéro 1)

ProtestInfo : Gérard Pella, dites-nous, pour celles et ceux qui ne la connaîtraient pas, quelle est la marque de fabrique de Hokhma ?

Gérard Pella : Cette revue de réflexion théologique a plusieurs spécificités. Elle a été lancée par des étudiants en théologie il y a trente-six ans et n’a jamais cessé d’avoir des étudiants dans son comité de rédaction. Elle ne dépend d’aucune institution académique ou ecclésiale. Et elle n’hésite pas à traduire des articles, de l’anglais principalement, parfois aussi de l’allemand ou de l’italien, ou à publier des prédications.


P : Quid de son positionnement théologique ?
G. P. : Elle ne cache pas ses convictions évangéliques mais ne craint pas la réflexion théologique et l’ouverture à des auteurs de convictions différentes : nous avons eu la joie de publier des personnalités comme André Biéler, Jacques Ellul, Walter Hollenweger, Jean Ansaldi, Henry Mottu ou Shafique Keshavjee.

P : A qui s'adresse la revue ?
G. P. : En priorité aux « professionnels » – étudiants en théologie et ministres –, mais nous comptons aussi des « laïcs » engagés dans leurs paroisses ou communautés parmi nos abonnés. Je dirais que Hokhma cherche à faire entendre une réflexion théologique d’inspiration évangélique, respectueuse de l’Ecriture et orientée vers le ministère.

Au début, nous nous sentions menacés, comme jeunes étudiants, par la redoutable critique théologique enseignée dans nos Facultés. Avec le temps, nous avons appris à relativiser, dialoguer mais aussi intégrer une partie de ses apports.

P : Précisément, la ligne de la revue et le lectorat visé ont-ils évolué au fil des ans ?
G. P. : Oui ! Au début, nous nous sentions menacés, comme jeunes étudiants, par la redoutable critique théologique enseignée dans nos Facultés. Avec le temps, nous avons appris à relativiser, dialoguer mais aussi intégrer une partie de ses apports. Nous nous comprenons plus comme des ouvriers qui participent à la construction d’une réflexion théologique que comme des soldats qui défendent des positions acquises.

P : Qui sont ces « ouvriers » ?
G. P. : Le comité de rédaction réunit pour la préparation de chaque numéro semestriel une dizaine d’étudiants en théologie et de pasteurs de France et de Suisse, réformés et évangéliques. Au fil des ans, plus de 120 personnes ont fait partie du comité. Avec le temps, la proportion croissante de pasteurs dans le comité a aussi orienté notre intérêt vers des questions plus pratiques, à côté des grands articles techniques.

P : Qui sont vos concurrents dans le monde des publications de théologie francophone ?
G. P. : Je préfère parler de complémentarité ou d’émulation plutôt que de concurrence. Mais je pense à Théologie Evangélique, publiée par la Faculté libre de théologie de Vaux-sur-Seine. On pourrait aussi citer La Revue réformée, adossée à la Faculté de théologie évangélique Jean Calvin, à Aix-en-Provence.

P : De votre point de vue, quelles questions théologiques abordées par la revue ont suscité le plus débat au fil des son histoire ?
G. P. : Dans les années 70, c’est l’interprétation de l’expérience charismatique qui nous a probablement le plus passionnés. Le statut de l’Ecriture également. Plus récemment, c’est le débat autour de l’homosexualité et les questions d’archéologie qui ont suscité le plus d’intérêt parmi nous et autour de nous.

P : Comme pasteur réformé, quel sens prend pour vous votre engagement dans le comité de rédaction ?
G. P. : Pour moi, la théologie est au ministère ce que le squelette est au corps. Il n’est pas souhaitable qu’il/elle apparaisse trop visiblement mais essentiel qu’il/elle soutienne toute la démarche. Je trouve précieux de pouvoir cheminer et réfléchir avec une équipe sans cesse renouvelée par l’arrivée de nouveaux étudiants. Le fait de « produire » une revue, et pas seulement discuter pour le plaisir, est aussi très stimulant.

P : Sous une couverture au graphisme coloré, le 100e numéro réédite quelques textes qui ont marqué l'histoire de la revue. Comment voyez-vous son avenir ?
G. P. : Le comité de rédaction s’est bien renouvelé ces dernières années. Nous voyons donc l’avenir avec espérance – ce sera le thème d’un numéro spécial en 2012, juste avant la fin du monde ! C’est évidemment un défi permanent de conserver et de trouver des abonnés par les temps qui courent. Mais nous croyons avoir un profil assez clair et constructif pour que de nouveaux lecteurs s’intéressent à notre revue.

Aussi sur la toile

Avec un tirage de 750 exemplaires aujourd'hui, Hokhma essaie de « payer les factures au fur et à mesure », selon le pasteur Pella. Elle ne vit que des abonnements (environ 500) et des dons de ses lecteurs. Si la revue est imprimée dans le Drôme provençale par IMEAF, elle est aussi présente sur internet. On y trouve toutes les coordonnées pour s'abonner, commander d'anciens numéros et télécharger gratuitement une partie de ceux qui sont épuisés...

S. R.