Jamaïque : une île entre paradis et violence
Par Esther R. Suter, Kingston
Une conférence internationale, comme celle du COE, peut-elle jouer un rôle positif pour la Jamaïque? Oui, répond sans hésiter Luwakemi Linda Banks, présidente du Conseil des Eglises Caraïbes. Cette rencontre est très importante pour ce pays, qui connaît un nombre de meurtres parmi les plus élevés au monde, et qui a traversé récemment de fortes violences urbaines.
Pour elle, les conférenciers venus des quatre coins du monde montrent que les Eglises s’intéressent aux Jamaïcains et cela donne de la force aux chrétiens sur place.
Les préparatifs pour la conférence ont aussi donné un coup de pouce au gouvernement et à ses efforts pour diminuer la criminalité dans le pays. Celui-ci a lancé un programme - “I believe”-Campaign - (la campagne ‘je crois’) qui a pour but de tirer une chose positive d'une situation négative. Un concert a par exemple été organisé pour les jeunes à Emancipation Park.
Puissance des gangsParlant de la violence, Bärbel von Wartenberg Potter, pasteure et ancienne évêque allemande de l’Eglise luthérienne, a parlé de la structure de „gang“, qui se transmet dans une famille de père et fils. Cette structure est utilisée dans le trafic de drogues entre la Jamaïque, les Etats-Unis et le Canada, et dans le trafic d’armes entre les Etats-Unis et la Jamaïque.
Le trafic de drogues, avec la Colombie par exemple, semble être une des grandes sources de revenus pour des gangs et génère une grande violence. A Kingston, le quartier Tivoli Garden semble être le lieu de prédilection des gangs. L’automne dernier, un conflit entre un gang et la police, a presque tourné en guerre civile.
“Farmin inna di City”Comment les églises ou les organisations non-gouvernementales abordent le problème de violence ? La pasteure Doreen Wynter, engagée à Jones Town Baptist Church à Kingston, a lancé un projet: “Farmin inna di City”.
Le projet est implanté dans le quartier de Jones Town, au centre de Kingston, habité par la classe moyenne jusqu’à la fin des années 70. Les habitants ont ensuite quitté le quartier en raison des violences qui s'y développaient. Les maisons sont restées vides et ont commencé à se délabrer. Des gens pauvres, des chômeurs les ont investies, de sorte que le quartier s'est rapidement retrouvé surpeuplé.
Pour revenir à “Farmin inna di City”, il s'agit d'implanter une serre et une pisciculture sur un champ en frîche, que la ville de Kingston a loué à la paroisse Jones Town Baptist Church. Le but est de donner du travail à des habitants du quartier, qui pourront ainsi mieux nourrir leur famille. La paroisse met à disposition le champ, la semence, les plantes et les outils ainsi que les informations nécessaires.
Dans ce quartier, Doreen Wynter a développé d'autres projets: une garderie pour des enfants, un centre pour des mères adolescentes, un système de bourses pour les jeunes qui veulent poursuivre leurs études et un repas-rencontre pour les personnes âgées le vendredi soir.
La pasteure veut encore développer un centre de soins ('care center') pour les personnes âgées, un lieu où on pourra leur garantir des soins médicaux. Son Eglise prévoit aussi d'apprendre à de jeunes gens à réparer des ordinateurs, ce qui pourrait leur permettre de trouver un job par la suite.
- Davantage d'informations sur le rassemblement pour la paix en Jamaïque, organisé par le Conseil oecuménique des Eglises (COE)*
- Righting Her-Story: “Caribbean Women Encounter the Bible Story”, ed. Patricia Sheerattan-Bisnauth. Ce livre est édité par une femme des Caraïbes, une pasteure de Guyane. De 2000 à 2011, Patricia Sheerattan-Bisnauth a travaillé à Genève comme directrice des programmes “partenariat de la femme et de l’homme”; “justice” et “jeunesse” de la Communion Mondiale des Eglises Réformées (CMER).
Des théologiennes et des laïques des Caraïbes ont contribué à ce livre. La pasteure Doreen Wynter de Kingston y décrit la vie de la pasteure Dr. Marjorie Lewis, qui est la première femme présidente du United Theological College of the West Indies à Kingston. Ce livre montre avec des exemples concrets combien la violence persiste dans la société jamaïcaine. Des passages soulignent la crualité dont souffrent parfois les femmes et des filles en Jamaïque. ERS