Forum Global Ethics: une « vision nouvelle » de la responsabilité sociale des entreprises est nécessaire
« Tout un système doit être mis en place au plan international pour la gouvernance mondiale des entreprises », a déclaré Michel Doucin, ambassadeur chargé de la bioéthique et de la responsabilité sociale au ministère français des Affaires étrangères et européennes.
Les crises mondialesDans son allocution prononcée au premier jour du Forum, qui s'est tenu aux Nations Unies, M. Doucin a mis en avant les crises – économique, alimentaire, financière, écologique et sociale – que connaît le monde à l'heure actuelle.
Avant lui, à l'ouverture du Forum, l'ambassadeur suisse Walter Fust, président de Globethics.net, a souligné que les entreprises ont besoin de politiques et de pratiques « faisant l'objet d'un accord entre les parties prenantes et les actionnaires responsables. »Au cours du Forum, des représentants des milieux d'affaires, d'ONG et d'organisations internationales ont échangé leurs expériences en matière de responsabilité sociale des entreprises.
Expériences en IndeS.D. Shibulal, cofondateur et PDG désigné d'Infosys, la plus grande société informatique de l'Inde, a affirmé que son entreprise appliquait une « tolérance zéro » face aux violations de son système de valeurs.
« Si les résultats d'une personne ne sont pas au rendez-vous, elle a la possibilité de s'améliorer », a expliqué le PDG indien. « Mais si elle ne respecte pas les valeurs, alors elle est remerciée d'office. »
« Réfléchir à ses pires pratiques et en tirer les leçons »« Au lieu de réfléchir aux pratiques exemplaires de l'entreprise, nous devons réfléchir à ses pires pratiques et s'efforcer d'en tirer les leçons », a relevé pour sa part Jacques Spelkens, chef du département d'innovation sociale chez GDF Suez, à Paris. Parallèlement, les entreprises doivent anticiper les problèmes éventuels en incluant des clauses environnementales, anti-corruption et sociales dans les contrats.
Cependant, selon Christoph Müller, président d'Inrate, une agence indépendante suisse de notation de la durabilité, certains experts de la responsabilité sociale des entreprises affirment qu'il est « très difficile d'obtenir des ressources dignes de ce nom pour mettre en œuvre des projets de responsabilité sociale dans leurs entreprises. » Dans de nombreuses sociétés, a ajouté Christoph Müller, la responsabilité sociale de l'entreprise est considérée comme un « poste de dépense ».
Githa Roelans, du Bureau international du travail (BIT), a expliqué que son organisation s'efforce de mettre en place des normes internationales dans le domaine du travail depuis sa fondation, en 1919. Elle a notamment élaboré une déclaration sur les entreprises multinationales et la politique sociale, qui a été adoptée dès 1977. L'Organisation internationale du travail, dont le siège est à Genève, réunit des représentants du patronat, de syndicats et de gouvernements. Il s'agit de la plus ancienne des organisations multilatérales.
Expériences brésiliennes d'EthosBetina Sarue, de l'Institut Ethos des entreprises et de la responsabilité sociale, à São Paulo, Brésil, a fait écho au message de Michel Doucin en affirmant que l'action volontaire des entreprises doit être complétée par des politiques publiques. Son institut, qui rassemble 1300 entreprises concentrant 35% du PIB brésilien, s'efforce de promouvoir une évolution vers une économie verte et responsable.
Mme Sarue a indiqué qu'un groupe d'entreprises d'Ethos avait créé un « Forum climatique » pour demander au gouvernement de fixer des objectifs précis en matière d'émissions de carbone, avant le sommet des Nations Unies sur le climat à Copenhague, en 2009.
Dans un autre domaine, Ethos fait campagne en faveur de « jeux propres à l'intérieur comme à l'extérieur des stades », alors que le Brésil accueille la Coupe du monde de football en 2014 et les Jeux olympiques en 2016.
Produire malgré les conflitsDes entrepreneurs actifs en Afrique sont ensuite intervenus. La proximité avec les communautés locales est essentielle pour promouvoir la responsabilité sociale, a affirmé Frank Eba, chargé du développement durable au sein du Groupe SIFCA, qui produit de l'huile de palme, du caoutchouc et du sucre dans cinq pays d'Afrique de l'Ouest.
Grâce à son implantation au niveau local, le groupe a pu poursuivre la production malgré une décennie de conflit armé, qui a récemment coûté la vie au PDG de SIFCA en Côte d'Ivoire. « Nous savons que nous sommes mariés aux communautés locales sur le long terme », a poursuivi M.Eba.
Le Forum est un projet de la Fondation Globethics.net, réseau mondial basé à Genève qui encourage l'échange d'idées et la recherche sur l'éthique et les valeurs. Le thème du Forum était « La valeur des "valeurs" en affaires. Perspectives mondiales, solutions pratiques ».
Le Forum a attiré plus de 200 participants. Au programme figuraient des sessions et des ateliers animés par une cinquantaine d'intervenants s'exprimant sur des questions aussi diverses que les normes dans la finance et le secteur bancaire ou le rôle du leadership spirituel pour changer les mentalités. (JMP)