Père Henri Didon, le dominicain auteur de la devise olympique

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Père Henri Didon, le dominicain auteur de la devise olympique

17 juillet 2008
Les Olympiades de l’ère moderne doivent à Henri Didon, Père dominicain ami de Coubertin, leur devise « Citius, altius, fortius »

Portrait d’un homme de foi, passionné par le progrès, la démocratie et la pédagogie.Né en 1840 dans l’Isère, Henri Didon suit les cours du petit séminaire de Rondeau, près de Grenoble. Un lieu d’études réputé pour l’excellence de ses cours, mais aussi car les élèves y organisent, depuis 1832, des Jeux olympiques en souvenir de ceux qui se déroulaient dans l’Antiquité grecque. Le programme des épreuves est déjà bien étoffé : jeux de boules, courses de chars et de sacs, jeux de ballon. On introduira même au fil des ans, l’escrime, le saut à la perche, le lancer du disque dans ces joutes qui eurent lieu jusqu’en 1950. Les religieux qui dirigeaient Rondeau croyaient à la dimension pédagogique du sport et souhaitaient développer par l’organisation de cette manifestation, l’esprit d’initiative de leurs élèves et leur attachement aux valeurs morales.

Marqué par les méthodes de ses maîtres, Henri Didon devient dominicain à 17 ans, puis prêtre en 1862. Orateur talentueux, il prêche en France, en Angleterre, en Belgique, avec une liberté de ton pas toujours appréciée de ses supérieurs. Elle lui vaut d’ailleurs un exil de deux ans dans un couvent de Corbara, en Corse. Mais il persiste à vouloir concilier sa foi avec les avancées du progrès. Ami de Pasteur, il se passionne pour Christophe Colomb et suit les cours de Claude Bernard au Collège de France.

En 1890 il publie une « Vie de Jésus- Christ » qui rencontre un grand succès. Son exil se termine et il est appelé à diriger le Collège Albert Le Grand à Arcueil près de Paris. Avec ses droits d'auteur, Le Père Didon améliore l’enseignement, notamment en allégeant la discipline, et construit des équipements sportifs: manège pour l'équitation, bassin de natation, piste de courses. Du jamais vu dans le monde scolaire ! Il a en effet l’ambition d’en faire une école phare dans tous les domaines.

C’est alors qu’il reçoit la visite de Pierre de Coubertin, qui vient lui demander son appui. A 27 ans, le baron rêve déjà de restaurer les olympiades et souhaite organiser des épreuves sportives entre élèves de collèges privés et publics. Un défi difficile à relever dans la France de la fin du 19ème siècle ! Didon lui répond par la tenue, trois mois plus tard, des premiers championnats de sports athlétiques à Arcueil, avec comme but d’effacer les frontières idéologiques par la fraternité sportive. A la fin des compétitions, le Père distribue aux participants un drapeau blanc et noir - couleurs des dominicains – brodé de l’écusson de leur collège. Et surtout il donne pour devise à la nouvelle Association athlétique Albert-le-Grand « Citius, altius, fortius, les trois mots latins appelés à faire le tour du monde, puisqu’ils vont devenir et sont toujours la devise officielle des JO.

Conseiller de Coubertin, Henri Didon emmène des élèves à Athènes aux Jeux de 1896. En célébrantla première messe olympique de l'Histoire devant 4 000 personnes à Saint-Denys l'Aréopagit, il précise sa vision de l’évènement : « En venant ici, dit-il je voulais apprendre à la jeunesse qui m’est confiée, à entrer dans le mouvement d’union internationale qui semble un premier pas vers la fraternité des peuples et verra cette unité morale que Jésus a formulée ». Une profession de foi en l’avenir digne du jeune homme qu’il fut, qui visitait l’Allemagne deux ans après la fin de la guerre…

Tolérant, il favorise la libre initiative des adolescents et croit dans les vertus de la démocratie associée à la foi. Cela lui vaudra un mauvais procès en 1898 en pleine affaire Dreyfus, suite à son discours de distribution des prix. « Je me souviens de ce discours. Avec une audace sans pareille, devant ses élèves captivés et des parents mal à l'aise, il prit à bras le corps la bête noire du moment, l'antisémitisme et lui donna son vrai nom, la paresse... »,rapportera Coubertin après la mort de son ami.

Henri Didon perdra la vie brusquement le 13 mars 1900, à l'orée de ses soixante ans. Parmi les nombreux hommages qui lui sont rendus, celui de l’Union des sociétés françaises des sports athlétiques, saluant « ce moine libéral qui ouvrit le premier aux sports athlétiques les portes d’une maison religieuse ».