Clonage d’embryons humains : "Tout progrès scientifique ne fait pas forcément avancer l’humanité »

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Clonage d’embryons humains : "Tout progrès scientifique ne fait pas forcément avancer l’humanité »

3 décembre 2001
Théologienne et membre de la Commission nationale d’éthique, Andrea Arz de Falco se montre très sceptique face aux annonces contradictoires concernant des tentatives de clonages d’embryon humain réalisées par la firme américaine Advanced Cell Technology Inc
Le travail des éthiciens face aux résultats claironnants de certains laboratoires s’avère délicat : comment faire admettre la valeur de critères éthiques dans la course au clonage ?Andrea Arz de Falco fait partie de la récente Commission d’éthique nationale pour le domaine humain, instituée en juillet dernier. L’effet produit par l’annonce du clonage d’un embryon humain ne la surprend pas. « La publication de ce genre de résultat était dans l’air du temps». Elle note cependant que les scientifiques ont passé à l’acte sans scrupule outre atlantique, tandis qu’en Suisse, les équipes des laboratoires sont limitées par les lois, ce qui crée encore des réticences. Pourtant la théologienne, qui est aussi chargée de cours à l’Institut d’éthique des Droits de l’homme à Fribourg, reconnaît que le face à face entre biotechnologie et éthique s’avère plus difficile à gérer car les sciences sont également touchées par la globalisation. « Un chercheur suisse qui va faire un stage dans une équipe aux Etats Unis découvre que ce qui est interdit ici, ne l’est pas là-bas, explique-t-elle, dès lors, tout devient relatif , ici on pense ça, et là-bas, d’autres valeurs sont en jeu. Il sera difficile ensuite de lui montrer que l’éthique a aussi un ancrage culturel. »

§La raison thérapeutique a bon dosLa firme américaine qui a annonçé le clonage d’un embryon humain, a voulu se distancer en précisant que sa tentative relevait du clonage thérapeutique et non reproductif. Selon Andrea Arz de Falco, « l’impératif médical n’est pas une raison absolue, il ne justifie pas tous les sacrifices ni tous les dérapages au nom d’une guérison hypothétique ». La théologienne insiste sur les limites de l’existence. « Il ne faut pas se laisser prendre par l’euphorie provoquée par la nouveauté, je plaide plutôt pour un scepticisme de mise. Il y aura toujours des gens qui tombent malades ». Ecarter cette donnée, c’est se méconnaître sur la vie humaine.

§Que reste-t-il de l’humanisme ?Depuis 1998, Andrea Arz de Falco préside également la Commission fédérale d’éthique concernant le domaine non humain. A son agenda , elle a donc deux dossiers très lourds dans l’année à venir. D’une part, la question de la dissémination des OGM (organismes génétiquement modifiés) préoccupent les éthiciens, d’autre part, le débat autour de l’usage des cellules souches, très prometteuses sur le plan médical, ne fait que commencer. « Réfléchir en termes de valeurs représente à chaque fois un défi, avoue la théologienne, il faut être capable d’abstraction tout en restant présent avec des recommandations précises. » Reste que le dialogue avec la communauté scientifique demande une certaine fermeté, Andrea Arz de Falco en a fait largement l’expérience. « Quelques fois, j’ai l’impression que nous sommes engagés, sur le plan de la recherche, dans un chemin qui s’éloigne de l’humain, alors que je me sens proche d’une vue humaniste de la créature».