Desmond Tutu fait de la publicité pour la Winterthur. Réactions
3 juillet 2000
La Winterthur Assurance vient de publier dans la presse suisse et internationale une publicité montrant Desmond Tutu mains jointes, comme s'il priait, disant les dangers encourus pour sa foi : "Bien sûr, la foi est un risque, mais je ne me risquerais pas à vivre sans"
Outre le mélange hasardeux entre commerce et foi, le Prix Nobel de la paix prête ainsi son image à un établissement d'assurances appartenant au Crédit suisse qui a fait des affaires florissantes en Afrique du Sud du temps de l'apartheid.
CLAUDE MONNIER, DIRECTEUR DE LA REVUE "LE TEMPS STRATEGIQUE"
"Je trouve choquant que Desmond Tutu ait accepté. Cela déprécie son image et celle des Eglises par la même occasion. En sont-elles vraiment réduites à ces moyens-là de nos jours pour trouver de quoi vivre? Cette publicité donne en tous cas à le croire. Sans parler du malencontreux mélange entre valeurs spirituelles et valeurs marchandes. Admettons que Desmond Tutu reverse ses cachets aux déshérités d'Afrique du Sud, cela ne représente pas pour moi une circonstance atténuante, mais met en évidence un dilemme: accomplir quelque chose qui dérange la conscience en échange d'une somme d'argent pour les pauvres, c'est une situation intenable. Et c'est typique de notre époque de nous confronter à des dilemmes intenables. En dernière analyse, et pour parler en protestant, je crois que tout repose sur l'individu, qui est l'ultime responsable des ses actes".
PIERRE-LUIGI DUBIED, DOYEN DE LA FACULTE DE THEOLOGIE DE L'UNIVERSITE DE NEUCHÂTEL
C'est triste d'en arriver là , à employer l'Evangile comme argument pour la vente d'une marchandise. En effet, la caractéristique première de L'Evangile est sa gratuité. Il transmet gratuitement la parole de Dieu. Or, Desmond Tutu contredit cette réalité en mettant en scène et en image sa foi dans un contexte commercial. La publicité le spécifie clairement: il s'agit bien de "l'archevêque Desmond Tutu". Ce genre de procédé a pour effet d'accentuer l'emprise de l'économie sur la religion, domaine qui a pourtant tout intérêt à s'en préserver".
DENIS MÜLLER, PROFESSEUR D'ETHIQUE A L'UNIVERSITE DE LAUSANNE
"Je suis frappé du manque de transparence ou de la naïveté de Desmond Tutu. En raison de sa personnalité mondialement connue, il doit forcément s'attendre à ce qu'on le questionne sur ses relations avec la Winterthur et le Crédit Suisse, et sur l'usage qu'il entend faire de cet argent. Si les intentions sont bonnes, il n'y a aucune raison de garder de silence. Je vois des ressemblances avec la campagne publicitaire de Benetton. Le problème n'était pas les images de Toscani mais la commercialisation par Benetton. On n'a jamais obtenu d'explications crédibles à ce sujet. Le geste de Desmond Tutu qui met la foi au centre d'une opération publicitaire est tout aussi problématique, en particulier avec l'aura qui est la sienne. Il ne peut donc pas se dérober au débat public".
CLAUDE MONNIER, DIRECTEUR DE LA REVUE "LE TEMPS STRATEGIQUE"
"Je trouve choquant que Desmond Tutu ait accepté. Cela déprécie son image et celle des Eglises par la même occasion. En sont-elles vraiment réduites à ces moyens-là de nos jours pour trouver de quoi vivre? Cette publicité donne en tous cas à le croire. Sans parler du malencontreux mélange entre valeurs spirituelles et valeurs marchandes. Admettons que Desmond Tutu reverse ses cachets aux déshérités d'Afrique du Sud, cela ne représente pas pour moi une circonstance atténuante, mais met en évidence un dilemme: accomplir quelque chose qui dérange la conscience en échange d'une somme d'argent pour les pauvres, c'est une situation intenable. Et c'est typique de notre époque de nous confronter à des dilemmes intenables. En dernière analyse, et pour parler en protestant, je crois que tout repose sur l'individu, qui est l'ultime responsable des ses actes".
PIERRE-LUIGI DUBIED, DOYEN DE LA FACULTE DE THEOLOGIE DE L'UNIVERSITE DE NEUCHÂTEL
C'est triste d'en arriver là , à employer l'Evangile comme argument pour la vente d'une marchandise. En effet, la caractéristique première de L'Evangile est sa gratuité. Il transmet gratuitement la parole de Dieu. Or, Desmond Tutu contredit cette réalité en mettant en scène et en image sa foi dans un contexte commercial. La publicité le spécifie clairement: il s'agit bien de "l'archevêque Desmond Tutu". Ce genre de procédé a pour effet d'accentuer l'emprise de l'économie sur la religion, domaine qui a pourtant tout intérêt à s'en préserver".
DENIS MÜLLER, PROFESSEUR D'ETHIQUE A L'UNIVERSITE DE LAUSANNE
"Je suis frappé du manque de transparence ou de la naïveté de Desmond Tutu. En raison de sa personnalité mondialement connue, il doit forcément s'attendre à ce qu'on le questionne sur ses relations avec la Winterthur et le Crédit Suisse, et sur l'usage qu'il entend faire de cet argent. Si les intentions sont bonnes, il n'y a aucune raison de garder de silence. Je vois des ressemblances avec la campagne publicitaire de Benetton. Le problème n'était pas les images de Toscani mais la commercialisation par Benetton. On n'a jamais obtenu d'explications crédibles à ce sujet. Le geste de Desmond Tutu qui met la foi au centre d'une opération publicitaire est tout aussi problématique, en particulier avec l'aura qui est la sienne. Il ne peut donc pas se dérober au débat public".