Mettre à profit un temps de jeûne
Depuis vingt ans, Martin Hoegger jeûne chaque année durant une semaine complète – à laquelle s’ajoute une semaine de préparation et une semaine de sortie de la pratique – pour le carême. Il a hâte de retrouver cette période particulière «toujours pleine de surprises» et, paradoxalement, de «convivialité».
Ce pasteur protestant participe au mouvement de jeûne organisé par Action de carême et Pain pour le prochain. Dans la chapelle catholique de Cheseaux, il retrouvera quotidiennement un groupe oecuménique régional de jeûneurs, également ouvert aux personnes non chrétiennes intéressées par la démarche. «Tous les soirs, nous nous retrouvons à 19h pour échanger. Le jeûne provoque toujours de nouvelles sensations, qu’il est important de partager.»
Approfondissement spirituel
Pour ce croyant, la démarche est, d’abord, une manière d’approfondir sa spiritualité et sa relation à Dieu. «C’est un moment pour rencontrer le Christ à travers le manque. Il n’y aurait pas Pâques sans Vendredi saint.» Concrètement, puisque moins de temps est consacré au repas, le quotidien permet davantage de place pour la prière, qui est aussi plus intense, plus longue. «Moins préoccupé par la digestion, le corps est plus disponible.»
Une sensation partagée par Aline Henny, maman au foyer de 35 ans, qui a commencé cette pratique il y a une dizaine d’années et ne raterait cette période pour rien au monde. «A l’époque, je vivais chez mes parents. Je m’étais aménagé un espace dans les combles. J’y allais beaucoup pour prier… et pour fuir les tentations alimentaires!»
Cheminement intérieur
La démarche est aussi l’occasion d’un vrai retour sur soi, un temps pour un questionnement intérieur. «La première fois, je l’ai fait pour sortir de ce cercle infernal métro-boulot-dodo. Et je me souviens que cela a été une révélation: jeûner m’a permis de comprendre que nous sommes esprit, âme et corps, et que les trois sont liés!» Depuis, elle consacre une semaine à cette pratique chaque année, hormis en période d’allaitement, précise la jeune maman.
Habitué des retraites spirituelles, qu’il pratique dans les mouvements œcuméniques des Focolari ou de Taizé, Martin Hoegger voit dans le jeûne un temps de discernement. «A chaque expérience, je prends des décisions. Il y a six ans, par exemple, j’ai présenté ma candidature comme conseiller synodal de l’Église à la suite de ce temps.»
Mais jeûner est, aussi, l’occasion de se relier à d’autres, dans une action de solidarité. «Chaque année, je verse le montant des repas que je n’ai pas pris durant cette semaine de jeûne, environ 200 francs, à des organismes luttant contre la faim ou la pauvreté», explique Martin Hoegger. Pour lui, cette dimension «extérieure», d’entraide, est déjà bien présente dans le protestantisme. Mais elle est indissociable d’une «relation à soi-même», que le jeûne permet d’approfondir.
Détox la Terre
2021 sera-t-elle l’année de la démocratisation du jeûne? Une action spéciale baptisée «Détox la Terre» est, en effet, prévue en Suisse romande. Elle réunit des jeunes chrétiens, qui cheminent ensemble depuis quelques mois, autour de la question écologique. L’idée est de s’interroger sur son rapport à la planète, aux autres et donc à Dieu à travers le jeûne.
Le jeûne peut consister à restreindre soit son apport alimentaire, soit sa consommation: écrans, achat de vêtements, transports polluants… A chacune et chacun de choisir une pratique qu’il souhaite questionner! Une célébration d’ouverture est prévue le 5 mars, le temps de jeûne en lui-même a lieu du 5 au 20 mars, jour choisi pour la célébration finale.
Informations : www.detoxlaterre.ch.