On en reparle au bistrot?

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On en reparle au bistrot?

24 novembre 2017
Chronique
Rédacteur responsable de Protestinfo, Joël Burri s’attriste de voir que le traitement par les médias généralistes de questions touchant à la politique ecclésiale suscite autant de méfiance au sein de l'Eglise.

«Le fait que les journaux s’en mêlent, ça n’aide pas à traiter sereinement la question». Cette petite phrase, entendue lors d’une discussion sur le pluralisme théologique dans l’Eglise, m’a attristé. Pourquoi? Parce que la personne qui a dit cela regrettait que l’on ouvre un débat qui, à mon avis, se doit d’être ouvert! Certes, les Eglises historiques ne jouent plus le rôle pilier de la société qu’elles avaient il y a encore 40 ans. Mais est-ce une raison pour se replier sur soi?

Les fidèles ne sous-estiment-ils pas la place que leur Eglise joue encore dans notre société? Les gens ne viennent plus au culte, mais on oublie qu’ils vont encore moins au cinéma! Les gens ne viennent plus au culte, mais beaucoup demandent encore un baptême pour le petit dernier et une cérémonie funèbre avec le pasteur. «Pour certains, la paroisse est comme un fer à bricelets. On le range dans une armoire et on ne le sort que pour les grandes occasions, baptême, mariage, service funèbres», déclarait une conseillère de paroisse que je citais dans un précédant édito.

Les distanciés ont-ils moins le droit de s’exprimer sur la vie de leur Eglise que les piliers de temple? En m’élevant comme défenseur de ces derniers, je dirais que pour moi la réponse est clairement non. Alors je suis triste quand je vois que parmi les fidèles du premier cercle on s’inquiète de voir «24 heures» consacrer des articles aux tensions de l’Eglise réformée vaudoise avec sa frange évangélique. J'y vois le signe qu’on a oublié que cette Eglise se déclare être au service de tous dans le canton. Et à ce titre, on devrait se réjouir de voir que les grands débats qui la traversent intéressent la société dans son ensemble.

Dans certaines communautés on parle du «monde» pour désigner tout ceux qui ne font pas partie du «nous» de l’Eglise. Dans les mêmes communautés, on ne s’adresse pas au monde comme on s’adresse à la communauté. Ce n’est pas travestir ses pensées, c’est juste que le monde ne pourrait pas comprendre.

Mais quand on cultive le statut d’Eglise pour tout le monde, on devrait ouvrir à tout le monde la discussion sur les grandes options stratégiques. On devrait oser tenir le même discours devant celui qui ne loupe pas une étude biblique que devant la représentante de la municipalité. On devrait accueillir les inquiétudes suscitées par un projet avec le même sérieux sur un banc d’église que sur une chaise de bistrot.

Dans une ville, une région, un canton, tout le monde parle de la réforme des impôts, de la politique des transports ou de la libéralisation du cannabis, parce que tout le monde se sent concerné. Plutôt que de s’en inquiéter, il faut se réjouir si tout le monde se met aussi à parler de la formation pastorale ou de l’équilibre à trouver entre paroisses et aumôneries.