Des dignitaires musulmans à la Cathédrale Saint-Pierre

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Des dignitaires musulmans à la Cathédrale Saint-Pierre

Anne Buloz
5 novembre 2010
L'Ayatollah Muhammad Ali Al-Taskhiry, secrétaire général du World Forum for Proximity of Islamic Schools of Thought à Téhéran, remet un cadeau à Vincent Schmid, pasteur de la cathédrale St-Pierre. Il s'agit d'un vase décoré dans la tradition iranienne. © EPG

Des responsables musulmans de haut rang ont été accueillis jeudi, pour la première fois, à la Cathédrale Saint-Pierre dans le cadre du colloque international sur le dialogue islamo-chrétien, qui a eu lieu durant quatre jours à Genève. L’œcuménisme et les relations interreligieuses ont été au centre de la cérémonie, organisée par les Eglises locales protestante, catholique romaine et catholique chrétienne.




Une quarantaine de délégués musulmans ont participé à ce moment d’amitié et de communion, avant de rejoindre la mosquée pour une visite des lieux. Si elle n’avait encore jamais reçu de dignitaires musulmans, la Cathédrale Saint-Pierre a déjà été un lieu de partage interreligieux. « Nous y avons accueilli la communauté genevoise dans le respect de toutes les sensibilités après le crash du vol SR 111 et après le tsunami. C’est aussi ici qu’a été reçu le dalaï-lama », rappelle Charlotte Kuffer, la présidente de l’Eglise protestante de Genève (EPG). Plate-forme interreligieuse créée en 1992

Les représentants des trois Eglises reconnues à Genève ont voulu montrer, par leur accueil commun, la forte présence de l’œcuménisme dans le canton. Ils ont témoigné tour à tour de l’œcuménisme qui préside à leurs rapports ainsi que de leur expérience des relations interreligieuses ouvertes. « Nous avons vécu dans ce lieu des moments forts et fraternels. Ce qui nous divise est infiniment moins important que ce qui nous réunit », a assuré Jean-Claude Mokry, vicaire épiscopal du diocèse catholique chrétien de Suisse.


Mohamed Slaheddine Mestaoui prône lui aussi le dialogue, qu’il soit interne au monde islamique ou avec ses autres partenaires : « Le dialogue interreligieux est important. Il faut chercher ce qui nous lie et laisser de côté les désaccords. Beaucoup de choses peuvent nous unir. Nous avons tous le même espoir de paix, de fraternité et de dialogue. Le respect nous aidera face au fanatisme et à l’intégrisme ». Le membre du conseil islamique supérieur de Tunisie a été surpris par la simplicité ainsi que par l’absence de croix et d’images dans la cathédrale : « Cette cathédrale authentique ressemble beaucoup aux mosquées authentiques, qui reviennent aux sources ».

Construire un socle solide

Hasard du calendrier, cette rencontre entre chrétiens et musulmans, organisée par le Conseil œcuménique des Eglises (COE), s’est ouverte lundi, à peine quelques heures après qu’une attaque de l’organisation terroriste Al-Qaïda a fait 46 morts dans une église chrétienne de Bagdad. Charlotte Kuffer rappelle que Youssef Ibram, l’imam de la mosquée de Genève, a commencé le lendemain matin son intervention au COE en disant, en son nom personnel, que ceux qui ont tué ne peuvent pas se référer à un livre sacré.

Cet événement tragique ne fait que conforter la présidente de l’EPG dans ce choix de l’interreligieux : « C’est justement parce qu’il y a des événements comme ces assassinats, ou plus près de chez nous, la votation contre les minarets qu’une démarche comme celle-là est importante. Il faut encore renforcer les relations interreligieuses pour espérer construire un socle qui puisse être la base de relations moins tendues. Il faut de l’idéal et de la conviction, se laisser habiter par quelque chose de plus grand que la réalité ». Pour accepter l’autre et nous enrichir de nos différences.

Cet article a été publié dans :

Le quotidien genevois Le Courrier.